FJK 080

Lorrain Claude (Claude Gellée dit) (1600-1682)

Composition paysage

ca. 1635-1640
205 x 270 mm

Technique
Esquisse au fusain, plume et encre brune, lavis de brun sur papier, contours dessinés à la plume.

Provenance

Collection Georges Wildenstein, New York (Album Wildenstein)
E. V. Thaw & Co., Inc., New York
Collection Jan Krugier, Monaco (acquisition du précédent propriétaire en 1981), JK 3309
Fondation Jan Krugier

Bibliographie

ROETHLISBERGER Marcel, Claude Lorrain, L'Album Wildenstein, les Beaux-Arts, éd. française, Paris, 1962, cat. no 7, pp. 15-16; pl. 7 (ca. 1640);

ROETHLISBERGER Marcel, Claude Lorrain, The Drawings, Berkeley et Los Angeles (University of California Press), 1968, vol. I, cat. no 467, p. 199; vol. II, pl. 467 (ca. 1640);

ROETHLISBERGER Marcel, The Claude Lorrain Album in the Norton Simon Inc. Museum of Art, Los Angeles County Museum of Art, 1971, cat. no 6, p. 15; pl. 6 (1635-40).

Expositions

Jan Krugier Gallery, New York, 4 mai-27 juillet 1990;

Galerie Jan Krugier, Genève, 25 avril-15 juin 1991, Victor Hugo and The Romantic Vision, Drawings and Watercolors, cat. no 3, p. 85; reproduit p. 28;

Kupferstichkabinett, Staatliche Museen zu Berlin - Preussischer Kulturbesitz, Berlin, Linie, Licht und Schatten. Meisterzeichnungen und Skulpturen der Sammlung Jan und Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 29.05-01.08.1999, cat. 44, p.102; reproduction couleur p. 103;

Peggy Guggenheim Collection, Solomon R. Guggenheim Foundation, Venise, The Timeless Eye. Master Drawings from the Jan and Marie-Anne Krugier-Poniatowski Collection, 03.09-12.12.1999, cat. 55, p. 124; reproduction couleur p. 125;

Museo Thyssen-Bornemisza, Madrid, Miradas sin Tiempo. Dibujos, Pinturas y Esculturas de la Coleccion Jan y Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 02.02-14.05.2000, cat. 56, p. 144; reproduction couleur p. 145;

Musée Jacquemart-André, Paris, La Passion du dessin. Collection Jan Krugier et Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 19.03-30.06.2002, cat. 51, p. 126; reproduction couleur p. 127;

Hypo-Kulturstiftung, Munich, Das Ewige Auge - Von Rembrandt bis Picasso. Meisterwerke aus der Sammlung Jan Krugier und Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 20.07-07.10.2007, cat. 55, p. 126; reproduction couleur p. 127.

Notes

Notes (1)

Ce dessin s'impose d'emblée par sa composition très ferme. Une suite régulière de plans mène du triangle du repoussoir foncé, en bas à gauche, vers le second plan à droite, puis vers le fond. Dans la verticale, trois groupes d'arbres se succèdent à droite, puis deux groupes plus petits à gauche. Un cours d'eau traverse l'image en zigzag. Alors que les plans horizontaux ne contiennent presque pas de détails, le feuillage des arbres est travaillé à la plume, chaque groupe avec une écriture qui lui est propre.

Les forts contrastes de tons entre les surfaces homogènes foncées des ombres et les zones de lumière épargnées du papier blanc animent toute la scène. La structure des grandes lignes de la plume détermine la composition ; la suite des surfaces compactes du lavis donne vie à la scène. Les oiseaux dans le ciel ajoutent une note de mouvement; la maisonnette est l'unique trace de l'homme. L'unité du lavis de bistre, appliqué avec une transparence magistrale, éloigne l'image d'une reproduction naturaliste d'un paysage et la place au niveau d'une transposition purement artistique. L'art de Claude consiste à faire de la géométrie et à la rendre vivante. Le paysage évoqué par le dessin est un microcosme complet, comparable dans ce sens aux tableaux de Claude. La différence est que le petit format du dessin détermine une composition moins complexe que le format plus ou moins grand du tableau. Le dessin ne contient ni figures, ni détails au premier plan tels que des plantes, des petits ponts ou des animaux, et l'étendue spatiale est confinée. Le tableau, au contraire, étoffe les paysages de scènes animées de figures, de bâtiments et de lointains aérés. Toutefois, la vue imaginaire reste un espace idéalisé; des routes et des troupeaux peuvent le traverser, mais aucune route ne conduit directement au premier plan. C'est autour des années 1640 que l'on trouve des analogies plus étroites entre ce type de paysage dessiné et les tableaux.

Nombreux sont, dans les même années, les dessins de ce type très élaboré, œuvres autonomes qui ne sont pas des préparations pour des tableaux, ni des œuvres faites pour la vente, puisque l'on sait que Claude les conserva soigneusement pendant toute sa vie, accumulant ainsi à la fin une collection de plus de mille feuilles. On est accoutumé d'appeler ces œuvres des "dessins de nature", conscient du fait que Claude tient une place capitale dans l'histoire de l'étude de la nature, de l'observation sur le motif, du travail en plein air. Le biographe Sandrart décrit en détail comment il introduisit le jeune Claude à l'étude du paysage lors de leurs excursions communes.

On ne peut savoir si de tels dessins furent exécutés sur le motif, comme on l'a généralement assuré ou prétendu. L'esquisse sous-jacente au fusain, assez bien visible dans ce dessin, semble aussi sommaire et spontanée que l'exécution à la plume et au lavis est soignée. On peut imaginer que l'esquisse au fusain fut prise devant le motif, le reste étant ensuite travaillé en atelier (ce que le trait d'encadrement, tiré à la règle, pourrait confirmer).

Dans le modeste album d'esquisses de Claude appartenant au Nationalmuseum de Stockholm, il existe quelques feuillets avec des croquis sommaires de paysages à la plume ou au fusain, visiblement notés sur place. Dans la version finale, la force de la vision de Claude consiste toujours à façonner la nature dans une composition picturale. Parmi les 1200 dessins de Claude connus à ce jour, ce "dessin de nature" très fini est, depuis longtemps considéré par les collectionneurs comme le plus beau, celui qui résume le mieux l'art de Claude. Il en existe plus d'une centaine, datant des années de sa plus grande productivité, vers 1640. Cette feuille est, de surcroît, un cas exemplaire de conservation impeccable. Nous la voyons exactement telle qu'elle fut au moment de sa création, tandis que presque tous les tableaux ont subi, à travers les âges, des altérations, des restaurations, l'application de vernis et le noircissement de certaines couleurs. La raison de l'état exceptionnel de cette feuille est due au fait qu'elle se trouva jusqu'en 1970 dans un album, à l'abri de la lumière. Il s'agit de l'album factice, dit Wildenstein, du nom de son acquéreur en 1962, qui comprenait soixante (à l'origine quatre-vingt un) des plus beaux dessins de Claude. L'album a été constitué peu après la mort de Claude, à partir de la collection de l'artiste, soit par ses héritiers à Rome, soit par l'un des premiers acquéreurs. La personne qui a ainsi créé divers albums, a puisé dans l'ensemble des dessins de Claude et les a assemblés de manière aléatoire, mais selon un critère esthétique. Le premier propriétaire documenté fut le Prince Livio Odescalchi, mort en 1713. Avant lui, il appartenait peut-être à la reine Christine de Suède à Rome. Publié en 1962, 1968 et 1971, l'album fut démantelé par Norton Simon peu après 1970.

Marcel Roethlisberger, La Passion du Dessin, Musée Jacquemart-André, Paris 2002, pp. 126-127

 

Notes (2)

Un nombre considérable de dessins datés de 1640 environ, représentant des paysages solidement composés et d'une exécution soigneuse à la plume et au lavis sont assez semblables à Composition paysage. Dans ce dernier, on distingue successivement une opposition d'ombre en bas, à gauche, deux plans formés d'arbres à droite et la vue perspective. La zone centrale droite, encadrée de passages sombres, reçoit une forte lumière. Cette suite dynamique de plans forme un contraste avec les verticales des troncs d'arbres et les horizontales des eaux. 

Marcel Roesthlisberger, 1962, op. cit.

Demande d'information/de prêt

La Fondation Jan Krugier se consacre au rayonnement de la collection de dessins en prêtant régulièrement des œuvres pour des expositions. Les demandes de prêt devront comporter une présentation complète du projet.