FJK 035

Del Sarto Andrea (Andrea d'Agnolo) (1486/87-1530/31)

Saint Matthieu

ca. 1522-1526
Diam. 167 mm

Technique
Plume et encre brune, lavis d'encre brune et traces de fusain sur papier. Dessin inscrit dans un cercle et piqué à l'aiguille pour transfert.

Inscription effacée, au bas du drapé.

Provenance

Collection particulière
Vente Christie's, New York, 28 janvier 1999, lot 48
Collection Jan Krugier, Monaco, JK 5679
Fondation Jan Krugier

Expositions

Kupferstichkabinett, Staatliche Museen zu Berlin - Preussischer Kulturbesitz, Berlin, Linie, Licht und Schatten. Meisterzeichnungen und Skulpturen der Sammlung Jan und Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 29.05 - 01.08.1999, cat. 19, p. 52; reproduction couleur p. 53;

Peggy Guggenheim Collection, Solomon R. Guggenheim Foundation, Venise, The Timeless Eye. Master Drawings from the Jan and Marie-Anne Krugier-Poniatowski Collection, 03.09 - 12.12.1999, cat. 20, p. 54; reproduction couleur p. 55;

Museo Thyssen-Bornemisza, Madrid, Miradas sin Tiempo. Dibujos, Pinturas y Esculturas de la Coleccion Jan y Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 02.02 - 14.05.2000, cat. 19, p. 68; reproduction couleur p. 69;

Musée Jacquemart-André, Paris, La Passion du dessin. Collection Jan et Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 19.03 - 30.06.2002, cat. 22, p. 66; reproduction couleur p. 67;

Kunsthalle der Hypo-Kulturstiftung, Munich, Das Ewige Auge - Von Rembrandt bis Picasso. Meisterwerke aus der Sammlung Jan Krugier und Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 20.07 - 07.10.2007, cat. 26, p. 68; reproduction couleur p. 69.

Notes

Notes (1)

Les dessins de Del Sarto pour des motifs de broderie ne doivent pas être comparés à ses autres dessins. Bien qu'il soit considéré comme l'artiste le plus influent de la haute Renaissance florentine, il annonce le maniérisme que son élève Pontormo et Rosso Fiorentino menèrent à maturité.

En 1526, Margherita Passerini offre des ornements sacerdotaux à la cathédrale de Cortone au nom de son fils Silvio qui a reçu les insignes de cardinal des mains de l'évêque de Cortone, le 21 novembre 1521. Ils sont aujourd'hui conservés dans le musée de la cathédrale. Il s'agit d'un pluvial orné d'une Annonciation et d'un antependium pour le maître-autel, représentant la Vierge entourée des quatre évangélistes et de deux autres saints, et orné du blason familial et des insignes du cardinalat qui sont octroyés à Silvio Passerini le 1er juillet 1517 (Freedberg, 1963, p. 136 et Shearman, 1965, p. 249). En 1526, ce même cardinal commande à Andrea la grande Assomption de la Vierge (Palais Pitti, Florence). Une confusion provient d'un document stipulant que ces ornements ont été utilisés pour la première fois par le pape Léon X le 18 novembre 1515, pendant sa visite à Cortone. Shearman en conclut que le pluvial et l'antependium ont été exécutés à deux dates différentes, car il ne dispose pas d'information à propos d'un ajout ultérieur et parce que l'allusion à la date de 1521 pour la présentation en l'honneur du cardinal marque clairement un terminus post quem. Freedberg de son côté avance que Léon X a utilisé le pluvial et non pas l'antependium et peut-être même sans la Transfiguration d'Andrea (cf. cat. p. 99, n°1).

L'antependium a dû être terminé peu de temps après 1521 car les figures des deux saints de part et d'autre sont inspirées de cartons de Rafaellino del Garbo, l'un des spécialistes de ce genre de dessin (cf. n°15 du catalogue). Shearman y voit une collaboration des deux artistes. Il avance la date de 1522 au regard des similitudes stylistiques avec la Vierge de la Porta Pinti Madona, dont la date d'exécution est toujours un peu floue. C'est Ragghianti le premier qui a attribué les dessins de L'Annonciation, de La Vierge et des évangélistes à Andrea.

Avant la découverte de ces feuilles, Shearman a déjà dressé la liste des dessins des quatre évangélistes qui sont selon lui, de format, de technique et de médium identiques et les a attribués à Andrea: saint Jean et saint Matthieu sont conservés à Florence (Uffizi, inv. n°14221F et 14222F), saint Marc à Lille (Palais des Beaux-Arts) et saint Luc à Rome (Gabinetto Nazionale delle Stampe Farnesina, inv. 130467). Seul saint Jean regarde dans la direction opposée. Shearman voit dans ces dessins des cartons de travail. Il pense que la perforation du saint Luc est due au brodeur et non au dessinateur (Freedberg, 1963, p. 139, ne discute que le saint Jean et le saint Matthieu, les considérant à l'instar de Ragghianti, comme des copies, d'après des esquisses perdues; Shearman défend pour le saint Marc une attribution à Andrea).

Le saint Matthieu des Offices mesure 15,5 cm de diamètre et est donc plus petit que la feuille Krugier-Poniatowski [Fondation Jan Krugier], quoiqu'il lui manque la bande de contour. La comparaison entre les deux dessins reste difficile, car la feuille de Florence est difficilement lisible. Néanmoins le dessin des Offices a de nombreux rehauts de blanc et le papier est très fortement teinté et la lumière est dans une direction opposée, correspondant à celle de la broderie.

L'hypothèse communément admise serait qu'Andrea Del Sarto ait changé la direction du saint Jean et saint Matthieu pendant qu'il les dessinait. La feuille des Offices est donc celle qui aurait servi au brodeur. Tout comme saint Jean, saint Matthieu n'a aucune trace de perforation. Un dessin préparatoire à la sanguine, pour le drapé autour des hanches de saint Matthieu est conservé aux Offices (inv. 6447F) et montre un éclairage identique à celui de la feuille Krugier-Poniatowski [Fondation Jan Krugier]. Une autre étude préliminaire à la sanguine est encore plus éloignée du dessin final (Uffizzi, n°6448 F). Il est intéressant de constater qu'elle comporte aussi l'esquisse de la hanche de saint Jean. Par opposition au saint Matthieu, elle est dotée de la même composition et d'un schéma de lumière identique. Cette deuxième étude établit le lien entre les deux étapes consécutives. L'accent qu'Andrea met sur le dessin des drapés de la hanche est démontré sur des dessins préparatoires similaires pour la Lamentation Puccini (d'une date antérieure de dix ans) sur le recto et le verso de la feuille des Offices (inv. 307F; cf. cat. exp. Florence, 1986-1987, n°16). En 1965, Shearman (p. 250) montre les similitudes entre la pose de saint Matthieu et celle de son portrait conservé à la National Gallery de Londres (inv. 690): même manière de tenir un livre, même regard vers le spectateur, mais seuls manquent les plis caractéristiques autour des hanches. Shearman qui ne connaissait pas la feuille Krugier-Poniatowski [Fondation Jan Krugier], soutient l'attribution, en particulier pour le saint Luc, dont les hachures de la coiffure sont très proches de celles de saint Matthieu. Le traitement de la bouche et des yeux peut être comparé à celui de l'étude de l'Adoration des mages des Offices (inv. 634 E) que Shearman cite comme un écho à saint Luc.

Matthias Weniger, La Passion du Dessin, Musée Jacquemart-André, Paris 2002, pp. 66-67

 

Notes (2)

Il s'agit d'une étude pour l'un des quatre Evangélistes brodés sur l'habit sacerdotal ou "paramento", donné par Margherita Passerini, au nom de son fils le Cardinal Silvio, à la Cathédrale de Cortona, le 3 novembre 1526 (J. Shearman, Andrea del Sarto, Clarendon Press, Oxford, 1965, vol. II, p. 249, no 60).

Le paramento, aujourd'hui conservé au Museo Diocesano de Cortona, est composé de deux parties : le parement d'autel ou "paliotto" avec la Madonne encerclée ainsi que les quatre Evangélistes et la cape avec la Transfiguration. (S. J. Freedberg, Andrea del Sarto, Cambridge, 1963, fig. 14, pp. 158-164). Le "paliotto" fut réalisé, selon la liste de la donation, pour le maître-autel de la Cathédrale. Il fut tissé avec les armoiries de la famille Passerini soit avec le chapeau du cardinal Silvio. Le "paramento" fut utilisé quelques années auparavant par le Pape Leo X lorsqu'il célébra la Messe Pontificale à San Francesco de Cortona, le 18 novembre 1515, à la demande de Silvio Passerini qui fut nommé cardinal le 1er juillet 1517. Ainsi que John Shearman l'indique, le "paramento" fut exécuté en deux étapes : l'une avant 1515 et la seconde vers 1520 (John Shearman, op. cit. no 60). Les dessins pour les broderies furent commencés par Raffaellino del Garbo qui décéda en 1524. Shearman suggère que Sarto commença à travailler sur les broderies avant la mort de Raffaellino del Garbo, soit dès 1521, étant donné que la distribution des dessins entre les deux artistes, semblaient avoir été planifiée. La date de 1522 est retenue pour le médaillon central de la Madonne, en relation avec la Porta Pinti Madonna (John Shearman, op. cit., no 59, pl. 90b) ainsi qu'avec la partie centrale d'un dessin du Louvre (D. Cordellier, Hommage à Andrea del Sarto, Musée du Louvre, Paris, 1986, no 33). Freedberg date les broderies vers 1525-1526. Les deux médaillons avec des saints de chaque côté du "paramento" furent exécutés d'après des dessins de Raffaelino del Garbo (S. J. Freedberg, op. cit. vol. I, p. 136, fig. 14).

Des dessins à la plume pour chacun des Evangélistes furent répertoriés par Shearman (op. cit. pp. 357-359, p. 383, figs. 95a-b). Le dessin de saint Marc, dans le même sens que la broderie, est conservé au Musée des Beaux-Arts de Lille; celui de saint Luc, également dans le même sens que la broderie, est conservé au Gabinetto Nazionale delle Stampe, Rome ; celui de saint Jean, dans le sens inverse de la broderie, est aux Offices, ainsi que celui de saint Matthieu. La composition du présent dessin et de celui des Offices est donc inversée. Dans la composition finale, saint Marc et saint Jean sont à la gauche de la Madonne, alors que saint Matthieu et saint Luc sont à la droite de la Madonne.

A l'origine, Andrea del Sarto avait prévu de placer saint Matthieu à gauche et saint Jean à droite. Le présent dessin, ainsi qu'une étude à la sanguine pour un drapé, Offices, Inv. 6448F (John Shearman, op. cit. pl. 94a) furent probablement exécutés à cette période-là. Puis, Del Sarto décida d'intervertir la position de saint Matthieu et de saint Jean. C'est dans cette optique-là, qu'il réalisa le dessin inversé de saint Matthieu des Offices et qu'il utilisa probablement le recto du présent dessin pour effectuer le transfert du saint à la droite de la Madonne.

Shearman nous fait remarquer (op. cit. p. 250 et no 47) que la position du saint Matthieu est la même que celle adoptée dans le portrait conservé à la National Gallery de Londres Portrait of a man.

Un dessin recto-verso à la sanguine, des quatre Evangélistes penchés sur une balustrade, est aujourd'hui conservé au Getty Museum (Nicolas Turner, European Drawings, 3, Catalogue of the Collection, Los Angeles, 1997, no 43). Ce dessin est certainement une première idée pour le "paramento" avant que Del Sarto décida d'encercler les figures. Les Evangélistes sont montrés en pied et sans leurs symboles.

Christie’s, Important Old Master Drawings, New York January 1999 (traduit de l’anglais)

Demande d'information/de prêt

La Fondation Jan Krugier se consacre au rayonnement de la collection de dessins en prêtant régulièrement des œuvres pour des expositions. Les demandes de prêt devront comporter une présentation complète du projet.